L'Assemblé Local : un vin régressif

Je viens de boire cette bouteille de Pascal Henriot. Je ne connaissais rien de ce vigneron avant cette découverte. Je ne pense pas qu'en temps normal j'aurai pris le temps de faire un commentaire sur ce vin, car clairement, si je cherche à en avoir une appréciation objective, ce n'est ni un très grand vin, ni même un très bon vin. 

Mais le vin n'est pas qu'affaire d'analyse objective, de dégustation précise. Et en l'occurrence, ce vin a été pour moi un très beau vin d'émotion.


La robe est légère, claire, aux reflets pourpres. 

Le nez se présente dans un registre essentiellement primaire, sur la framboise et la cerise. Puis, à l'aération, apparaissent un peu de poivre, de viande crue (un côté sanguin, métallique), et de légères notes animales. Le nez n'est pas typé nature pour autant et pourrait évoquer un Corail du domaine d'Arlay. 

La bouche est fraîche, légère, portée par une acidité assez prononcée. Un peu fluide en finale, la bouche manque sensiblement d'allonge et de profondeur. C'est un vin au style frais, léger, sur le fruit primaire (on retrouve en bouche l'association framboise + cerise).   

Commentaire général: Sympa. Un vin de soif agréable, au rapport qualité prix remarquable. 
Mais alors pourquoi ce "petit" vin m'a-t'il autant touché? Et bien parce qu'il a eu l'effet sur moi d'une madeleine de Proust. Dès que j'ai trempé mes lèvres dans le verre, j'ai fermé les yeux, et j'ai retrouvé le goût de mon premier verre de vin. Pour les fumeurs, c'est un peu comme quand on arrête pendant plusieurs mois: la première cigarette qu'on refume a alors le goût de celle du lycée, celle qu'on fumait cachés dans le parc à vélo et à scooters... Et bien là, je retrouvais le vin de mon enfance, celui que je buvais chez mon grand-père, pour faire chabro (oui, j'ai goûté du vin alors que je n'avais pas encore 8 ans... une autre époque). C'était le vin de la "coopé", en Dordogne. Je l'ai retrouvé là intact, et j'ai pris un plaisir énorme à tomber cette bouteille. Un plaisir que beaucoup d'autres ne partageront sûrement pas, parce que sans cette dimension régressive et sentimentale, je n'aurai, c'est certain, pas autant apprécié.


 

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