Les 10 vins cochons - Edition 2017

Samedi 2 décembre 2017. Marché fini à 12h30. On boit le traditionnel apéro des producteurs. On plie tout, on fait manger la petite et on remonte dans la voiture direction Puy Guillaume, dans le Puy de Dôme, pour la 14ème édition du mythique salon de vins naturels "Les 10 vins cochons". 



La route sera épique. 30 cm de neige chez nous, un peu moins quand on descend dans la plaine (enfin pour moi, Thiers, c'est la plaine hein), mais elle tombe parfois drue. Il est 14h30 et il fait presque nuit. Partant de manière un peu précipitée, j'en oublie l'appareil photo. Dommage car il y avait vraiment là une ambiance et une atmosphère à capter, et puis quelques bonnes gueules qui méritaient vraiment leur portrait... 

Après 2 heures de route aventureuse non sans évoquer "Le salaire de la peur" (ou plus exactement son remake américain "Sorcerer"), nous voici enfin arrivés dans ce lieu vraiment étrange: l'abbaye de Montpeyroux. Une abbaye perdue au milieu des bois à quelques kilomètres de Thiers. Là aussi, à l'arrivée, sensation étrange d'arriver dans une soirée privée, celle d'une société secrète, qui nous rappelle d'autres images cinématographiques, en l'occurrence, l'arrivée fantomatique de Bill au domaine privé dans "Eyes Wide Shut". 

Mais très vite, une fois descendu de la voiture, l'ambiance change radicalement. On croise des figures désormais familières de la sphère du pinard nature en train d'aider des visiteurs visiblement très heureux à remplir leur coffre de cartons qu'on imagine remplis de trésors... Oui, nous sommes peut-être bien arrivés ici dans une orgie, mais pas satanique celle-là. Ce serait plutôt l'inverse: une ode à la vie, quelque peu païenne peut-être, un vaste salon de la camaraderie, de la bonne humeur et de la chaleur humaine (nécessaire pour réchauffer mon corps endolori par le froid). 

Dès l'entrée, on capte d'office qu'on est pas ici au Marché des Vins d'Ampuis. Pas de costards cravate (j'ai rien contre hein, mais un peu quand même), mais des éclats de rire. On sent aussi que ici, ça ne recrache pas beaucoup (non pas qu'on a affaire à des assoiffés, mais on célèbre ici le vin, et il est trop bon pour être perdu). Tiens, je parie que je vais pas croiser Michel Bettane...

Bon, pour la faire courte, j'avais 2 heures devant moi avant de remonter m'occuper des vaches dans ma montagne. Il fallait profiter mais être aussi un peu efficace, j'avais envie de gouter à tout! 

Le seul bémol dans ce temple de l'amitié, restait la température glaciale. Je n'avais plus froid certes, mais tout goûtait trop frais... Les magnifiques Bandol du château Sainte-Anne par exemple, qui avec ceux de la Tour du Bon constituent mes préférences dans l'appellation, n'étaient pas à leur avantage, paraissant stricts et fermés alors qu'ils sont habituellement d'une souplesse, d'une complexité et d'une profondeur remarquables... C'est finalement le Côtes de Provence qui goûtait le mieux. 

Je commence ma tournée par les vins locaux. François Dhumes qui, comme tous ici, à beaucoup souffert des rudesses du climat ces deux dernières années, constitue une superbe mise en bouche avec son fameux diptyque "Jeu de vin - Jus de Vilain". C'est hyper bon, frais, délicat, subtil. Là encore un bon carafage pour éliminer le gaz en trop lui aurait apporté une profondeur complémentaire, mais c'est excellent. 

Juste à côté, la star locale, Pat' Bouju. Le type avec qui tu peux pas échanger plus de trois mots tellement il est sollicité de toutes parts. Mais il t'oublie pas et reviens finir avec toi, 1 heure plus tard, la conversation entamée. Un mec hyper attachant avec un super esprit non marchant. L'avenir de l'agriculture passe par des gens comme ça. Ayant terriblement souffert du climat, il n'a plus ses fantastiques cuvées "Lulu" et "La Bohème" (j'ai bien fait d'en encaver tiens). Il me présente alors une Syrah, dénommée "Môl", étonnante de maturité et de concentration. Un gros jus qui sera délicieux dans quelques années. A côté de ses indispensables vins de fête "Festejar" blanc et rosé, un magnifique Muscat nouveau, d'une intensité aromatique remarquable, notamment sur la rose, qui évoque le Muscat Petits Grains (du Mas des Chimères par exemple) ou certains Muscat d'Alsace. C'est hyper bon et je vais en boire des litres pendant les fêtes.

 
Après un salut respectueux à Géraldine Pialoux et des félicitations pour son superbe "Marie-Jeanne", je découvre à côté les vins extraordinaires de Vincent Marie. Pas grand chose à faire boire (tout a-t'il déjà été bu?...) mais sa cuvée "Fusion" m'impressionne. Une bombe de fruits mûrs, d'une souplesse et d'un équilibre remarquables. Une quille de soif et de copains, structurée, riche, et gouleyante à la fois. Je ne résisterai pas à la tentation d'en siffler une bouteille dès le lendemain... Pour ça peut-être qu'il a baptisé son domaine "No Control": il est effectivement impossible de ne pas y succomber... 



Je me retourne et tombe sur le domaine des Foulards Rouge. P.... que c'est bon! Le primeur "Octobre", en magnum, goute superbement. Le parfait vin de circonstance. Les cuvées "La soif du mal" (tiens des cinéphiles eux aussi?) et "Akoibon" sont délicieuses. J'en ai rempli le coffre de la Dacia...



Mention spéciale également aux vins de Nicolas Vauthier, grand vinificateur de l'Yonne. Tout se goûtait magnifiquement (malgré le froid donc). Son "simple" Vin de France est un flacon de pur plaisir... Ses cuvées Coulanges et d'Irancy sont fabuleuses. 



Belle découverte également avec les vins de Pierre Rousse. Des vins étonnants (je ne fais de pub à aucun caviste en ligne hein) et hyper pédagogique pour moi dans mon parcours de neo amateur de vins. On a en effet un encépagement 100% Bordelais (Merlot, Cabernet Franc, Cabernet Sauvignon), sur des vignes poussant en terres languedociennes, avec une vinification naturelle sans aucun artifice. On vit alors l'expérience réjouissante de retrouver une palette aromatique bordelaise épurée, sur la finesse, la fraîcheur et le fruit. L'impression de boire un "Bordeaux nouveau". Un genre de dépucelage pinardier. Superbe. 



Je pourrai parler des vins de la Sorga, d'un extraordinaire vin jaune de Valentin Morel (il va beaucoup faire parler de lui ce vin, pour sûr), des vins d'Andrea Calek (un peu endormis par le froid, mais promis à de superbes dégustations dans quelques mois) et de bien d'autres encore mais j'y reviendrai après avoir bu ces formidables quilles dans de meilleures conditions.

J'avais envie de rester là, j'y étais bien. Je voulais gouter le reste, croiser la fourchette avec ces artistes du raisin, m'enivrer un peu au son du concert programmé... Mais la petite et son rhume s'impatientaient, les vaches m'attendaient là haut dans la montagne, il me fallait vraiment, à contrecœur, repartir....

Le soir, tard, après avoir fini mon devoir de fermier et de père de famille, j'ai rangé tout ce beau monde dans ma cave. C'était pour moi un peu Noël avant l'heure. J'ai ouvert quelques cartons pour prendre les photos (de mauvaise qualité pardon, mais il était 1 heure du tam') qui sont là. Je me suis couché, un sourire béat sur le visage. C'étaient seulement 2 heures dans une journée mais qui portaient en elles les graines de nombreux moments de bonheur à venir...






     

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